Sujet groupe nominal et accord
Bonjour,
J’ai vu cette question passer sur un site :
« Doit-on écrire « La colonie de Madagascar et ses dépendances sont mises en place… »
ou bien « La colonie de Madagascar et ses dépendances est mise en place… » ?
Mon premier réflexe a été de penser « La colonie + ses dépendances » donc logique accord au pluriel et c’est cet accord que j’aurais choisi sans même y réfléchir.
Cependant, avec le recul, je me pose la question suivante…
Ne pourrait-on pas également considérer et décider que le sujet puisse être uniquement La colonie de Madagascar ?
Merci d’avance
La logique veut que ce soit au pluriel.
C’est une addition de sujets, de plus, ses dépendances est le dernier terme avant le verbe.
Bonsoir Manu78,
Je vous remercie pour votre retour.
Comme je l’ai dit le pluriel me semble naturellement évident mais…je cherche toutefois à éclairer un autre possible cheminement.
Votre réponse est intéressante, mais elle ne colle pas avec la réflexion que j’essayais d’extrapoler.
Pourquoi me direz-vous ?
Eh bien parce qu’à mon sens peu importe la place de « ses dépendances », car pour moi. » ses dépendances » n’est que complément de « La colonie »et peut totalement disparaître de la phrase sans qu’elle ne perde son sens initial.
« Ses dépendances » n’est donc pas le « sujet » principal à mes yeux
…..Ou bien « ses dépendances » fait partie intégrante de l’ensemble du sujet…et accord singulier
Soit il s’y ajoute et est entendu comme étant un + s’additionnant (donc pluriel pour la suite)
Soit le sujet peut se passer de lui (ou fait partie intégrante de lui) et dans ce cas l’accord pourrait être possible au singulier
Si »ses dépendances » est considéré être complément, peu importe alors sa place…(à mon avis mais bien sûr je peux me tromper)
Il se trouve que vous avez le choix :
————
Le verbe peut s’accorder au singulier lorsque les deux sujets coordonnés sont au singulier et qu’ils sont l’expression d’une seule et même idée, d’un tout, ou qu’ils désignent une seule réalité de plus d’une façon.
La BDL et ses nombreux exemples m’a permis de comprendre plusieurs règles de grammaire. (ou : m’ont permis de comprendre)
BDL
———
La colonie de Madagascar et ses dépendances : les deux termes forment en effet un tout. On peut donc écrire :
La colonie de Madagascar et ses dépendances est mise en place…
Mais le pluriel est possible :
La colonie de Madagascar et ses dépendances sont mises en place… »
Décidément, je vous adore Tara 🙂
Je reconnais qu’en posant ma question, je savais que je risquais de m’exposer à foudres de guerre, voire passer de vie à trépas 😉 mais…je tenais tout de même à savoir si mon cheminement pouvait tenir la route ou si j’étais à côté de la plaque.
Chose faite.
Merci pour ce retour (et pour votre cheminement incroyablement ouvert)
Bonne soirée Tara
En fait, si je puis me permettre, dans le cas présent, et contrairement aux cas évoqués par la BDL, le choix n’est pas possible : soit il est question de l’entité et alors, seul le singulier est possible, soit il est question des composants de l’entité évoqués séparément (cf. mon exemple avec Saint-Pierre-et-Miquelon vs Saint-Pierre et Miquelon) et alors seul le pluriel est possible.
@Marcel
En posant ma question, je ne pensais pas aller aussi loin en recherches parallèles, je le reconnais, mais bon, c’est pour la bonne cause 😉
Ce tout petit possessif m’a perturbée, parce que oui, accompagné de la préposition, il peut parfaitement s’être voulu faire un distinguo (entité + ses dépendances) celui-ci permettant alors l’accord pluriel.
Sauf que (d’après moi) cela cloche.
Ce possessif n’a pas lieu d’être à mes yeux. En fait, il ne peut pas être placé là où il l’a été. Je tente de m’expliquer en reprenant votre exemple.
Saint-Pierre-et-Miquelon est = Un archipel = Une entité = accord singulier = ok
(L’île) Saint-Pierre et (l’île) Miquelon sont = 2 îles = l’une et l’autre = donc l’une + l’autre = accord pluriel = ok si l’on tient à différencier les deux îles
MAIS… auquel cas, nous ne parlons plus là de l’Archipel, mais des deux îles distinctes qui le composent. Nul doute n’est laissé dans la phrase.
Cheminement 1 : Dirions-nous « Saint-Pierre-et-sa–Miquelon« … ? non.
Miquelon est une île faisant partie intégrante (au même titre que l’île Saint-Pierre) d’un archipel dont le nom est soudé : Saint-Pierre-et-Miquelon.
Je ne pense pas qu’une « appellation/dénomination/etc » puisse être changée en son centre… même par un tout petit mot.
Cheminement 2 pour explorer le 2ème versant : Pourrions-nous dire « L’île Saint-pierre et sa Miquelon » ?
Il me semble que ce serait impropre.
En effet, aucune des deux îles n’appartient à l’autre. Ces deux îles composent/appartiennent à l’archipel.
Je reviens sur la phrase objet de mon post.
La colonie de Madagascar et ses dépendances.
À mon sens, ce groupe de mot n’est pas juste, car le possessif ne peut pas y avoir non plus sa place.
En effet, l’entité s’appelle précisément « La colonie de Madagascar et dépendances« .
Cette « appellation » est « soudée » (et elle inclut de fait les dépendances/territoires rattachés qui en font intégralement partie)
J’espère que vous me donnerez votre avis sur ce cheminement global.
D’ici-là je vous souhaite un bon après-midi Marcel1
Ps :
Cheminement 3 (pour aller jusqu’au bout) :
L’archipel Saint-Pierre-et-Miquelon comprend l’île Saint-Pierre et l’île Miquelon. (L’île Miquelon comprend elle-même plusieurs presqu’îles). L’archipel inclut également d’autres petites îles et minuscules îlots.
Pourrions-nous dire : L’archipel Saint-Pierre-et-Miquelon et ses petits îlots ? Pour moi, non, car ces îlots font déjà partie intégrante/sont inclus dans l’archipel …autant que dans le nom de l’archipel donc.
Pourrions-nous dire : « L‘archipel Saint-Pierre-et-Miquelon, incluant (dont) tous ses minuscules îlots, … « ?
Pourrions-nous dire « La colonie de Madagascar et dépendances, incluant tous les derniers territoires rattachés,… » ?
À mon sens,oui.
L’accord serait toutefois singulier
La présence du possessif ne pose aucun problème. Une dépendance, c’est [c]e qui se rattache, comme élément accessoire, à une chose principale nous dit le dictionnaire de l’Académie. Ici, la chose principale est la colonie de Madagascar, les dépendances de la colonie de Madagascar sont Anjouan, Mayotte, Grande Comore, Mohéli, etc. >>> ses dépendances sont Anjouan, Mayotte, Grande Comore, Mohéli, etc.
Évidemment on ne peut transposer cela aux autres cas : Miquelon n’est pas une partie ou un sous-ensemble ou un élément de Saint-Pierre, on ne peut donc pas dire la Miquelon de Saint-Pierre et par conséquent on ne peut non plus dire Saint-Pierre et sa Miquelon.
Idem pour votre cheminement 3 pour les raisons que vous dites.
Bon dimanche à vous également, Cocojade. 🙂
Apparemment colonie de Madagascar et (ses) dépendances est le nom d’une entité (comme par exemple Wallis-et-Futuna ou Saint-Pierre-et-Miquelon – évidemment dans ces deux cas et contrairement à celui qui nous occupe, la présence de traits d’union rend manifeste la désignation d’une entité unique), par conséquent le verbe qui suit doit normalement être au singulier, mais il faudrait avoir la phrase entière pour pouvoir décider. Ainsi, en reprenant un des deux autres cas, on pourrait aussi bien avoir un singulier qu’un pluriel (sauf que là encore la présence des traits d’union facilite les choses) :
Saint-Pierre-et-Miquelon est un archipel français / Saint-Pierre et Miquelon sont deux îles situées dans l’océan atlantique.
Edit
À la réflexion, il est possible que le petit ses joue le même rôle que les traits d’union dans Saint-Pierre-et-Miquelon / Saint-Pierre et Miquelon, autrement dit, il se pourrait bien que l’entité soit dénommée colonie de Madagascar et dépendances (obligatoirement sans déterminant devant dépendances), auquel cas le verbe qui suit se met forcément au singulier, et que l’introduction du possessif casse l’entité et qu’il faille alors entendre les deux membres de la coordination comme indépendants et référant par conséquent à deux entités distinctes, auquel cas le verbe qui suit est forcément au pluriel.
Bonsoir Marcel1
C’est exactement cela. La phrase n’est pas assez explicite.
En l’espèce, il m’a donc semblé impossible d’en écarter arbitrairement l’un des deux possibles accords.
Merci Marcel !
Bonne soirée
@Marcel
Effectivement, il semblerait que le nom précis de cette ancienne colonie soit » La colonie Madagascar et dépendances » même si à celle-ci, ainsi nommée, ont encore été rattachés successivement de nouveaux territoires.
Je cite une des références :
« La colonie de Madagascar et dépendances est une colonie française ayant existé de 1897 à 1946, avant de devenir un territoire d’outre-mer jusqu’à 1958. Elle administrait le territoire de l’ancien protectorat français de Madagascar, auquel ont été rattachés successivement d’autres territoires sous souveraineté française… »
Si vous regardez bien ma réponse, vous verrez que j’y avais donné un lien pointant vers cet article de Wikipédia. 😉
(Les liens hypertextes apparaissent en bleu.)
On peut considérer que « La colonie de Madagascar et ses dépendances « puisse introduire un verbe au pluriel, par exemple « La colonie de Madagascar et ses dépendances établisssaient une présence française dans l’océan Indien « mais en aucun cas « sont mises en place », ce serait un contresens historique.
J’aimerais bien avoir la phrase dans son entièreté et dans son contexte (un peu d’avant + un peu d’après), parce que même avec le singulier cette locution verbale me parait douteuse.
La colonie de Madagascar et dépendances est mise en place : bofbof = on ne peut pas mettre en place un territoire (avec un groupement de personnes, ça pourrait convenir, mais on n’est pas dans ce cas, présentement).
@Marcel1 Le terme colonie n’est pas à prendre au sens de territoire, mais au sens d’institution (colonie = administration coloniale). À ce titre, les formules avec ou sans ellipse du déterminant possessif et de la préposition sont admissibles : « La colonie de Madagascar et (de) (ses) dépendances est mise en place en 1897. » Colonie admet un complément de nom qui n’est pas Madagascar seul mais Madagascar et (de) (ses) dépendances. En 1897, ces dernières ne comprenaient que Europa, Bassas da India et Juan de Nova.
Certes, encore faudrait-il que ce sens existât autrement qu’à vos yeux, puisqu’ainsi que vous l’avez vous-même très récemment amicalement rappelé à Cocojade, nos yeux ne suffisent pas à eux seuls à faire règle ou sens.
Essayons voir tout de même ; ce sens n’est pas répertorié par les dictionnaires, mais il existe peut-être malgré tout autrement qu’à vos seuls yeux. Après tout c’est bien le cas par exemple de prison qui n’est pas censé signifier administration de la prison, pourtant on peut bien trouver par métonymie des énoncés du type la prison a demandé / a transféré / a refusé… = l’administration de la prison a demandé / a transféré / a refusé…
Si colonie peut signifier administration coloniale, alors on devrait pouvoir remplacer ce dernier syntagme par colonie. Comme on peut par exemple remplacer terre colonisée par colonie (quand colonisé est adjectif), ou administration de la prison par prison.
Il y a cet article de Wikipédia dans lequel apparait plusieurs fois administration coloniale, opérons la substitution :
Après avoir détruit la colonie française, les Japonais… L’énoncé est correct, mais ne conserve pas le sens initial.
La colonie de l’amiral Decoux, mise en place par le gouvernement de Vichy, est toujours en fonction en 1945. L’énoncé est correct linguistiquement, mais ne correspond pas à la réalité + ne conserve pas le sens initial.
Les Japonais, craignant que les Alliés ne pénètrent en force sur le territoire de l’Indochine pour en faire une voie de passage pour leurs troupes, décident d’éliminer la colonie française et de s’emparer totalement de la région. Énoncé correct, mais ne conserve pas le sens initial.
Il y a trois autres occurrences, pour lesquelles la conclusion est identique.
D’ailleurs, les occurrences de colonie + mettre en place / instaurer / installer, etc. ne sortent pas* : parce que ces sens + territoire ne conviennent pas, et parce que l’acception par métonymie que vous évoquez n’existe pas.
Encore une fois, si Cocojade avait plus de contexte, ça nous aiderait à y voir plus clair et à moins hypothéser voire parler dans le vide.
* on en trouve quelques rares, s’il est question du groupement de personnes.
Bonsoir @Marcel,
L’interprétation n’est pas nécessairement de mon côté. Le terme « colonie » possède un sens juridique précis, au sens de statut, de mode d’administration. La loi du 6 août 1896 précise dans son article unique : « Est déclarée colonie française l’île de Madagascar avec les îles qui en dépendent (sic). »
Je ne vois donc pas ce qui interdit de commenter ainsi : « Le protectorat de Madagascar et ses dépendances fut aboli en 1896 et la colonie fut réellement mise en place en 1897. » Quand il existe deux termes pour différencier la royauté du royaume, ce n’est pas le cas s’agissant des colonies. On dit bien aussi : « Les départements ont été créés en 1789.«
[edit] Il suffit de consulter les journaux officiels de la période coloniale française pour constater que le terme colonie est utilisé indifféremment pour désigner le statut, le régime de gouvernement, l’administration coloniale, le territoire, la population, les colons.
Bonsoir Bruno,
Eh bien je crois qu’il va falloir let’s agree to disagree, parce que je ne suis pas convaincu par vos arguments (et la réciproque est manifestement vraie ! 😀 ) – départements + créés ne me pose aucun problème, et dans l’extrait que vous citez colonie s’interprète comme territoire : Est déclarée colonie française l’île de M. = est déclarée territoire placé sous domination française l’île de M.
A contrario, remplacer colonie par administration coloniale produit un énoncé incorrect : Est déclarée administration coloniale française l’île de M. (sous administration coloniale conviendrait, mais il aurait fallu avoir est déclarée sous colonie française etc., (ce qui ne se dit pas, pour l’heure en tout cas, contrairement à sous colonisation).
Cet emploi de colonie dans le sens de administration / institution coloniale n’est pas absurde dans l’absolu, loin s’en faut, c’est juste que ce n’est pas entré dans l’usage – pour l’heure…
(Par curiosité – parce que je n’ai pas trouvé – pourquoi le sic ?)
Bonjour Marcel,
(sic) :parce que la citation est reprise mot pour mot
Il suffit de rechercher « instauration de la colonie » ou « mise en place de la colonie » dans Google scholar pour trouver de nombreuses occurrences où le mot colonie ne signifie plus simplement le territoire ou le groupement de personnes, mais le statut juridique, la personne morale.
Aux journaux officiels français ou belges, le terme s’étend à son administration puisque la colonie subventionne, paye des fonctionnaires, perçoit des amendes, tient une comptabilité… S’il s’était agi de la métropole, on aurait distingué dans ces textes législatifs et réglementaires l’Etat, la Nation, l’Administration, le Pays, la République, les Français… preuve sans doute du caractère hégémonique, voire totalitaire, du système colonial. :
Merci pour sic, j’ignorais qu’on pouvait l’employer de cette façon « neutre », je cherchais la coquille, l’erreur, la bizarrerie.
Bonsoir,
Il faut ici s’affranchir du seul raisonnement grammatical et s’attacher à la réalité historique : il n’y a jamais eu qu’une seule entité administrative et politique constituant » la colonie de Madagascar et dépendances » (période 1897-1946). Le singulier est donc impératif. La consistance desdites dépendances (actuellement Comores, Mayotte et TAAF) a pu varier au cours de la période mais n’a jamais entrainé de mise en place distincte puisque ces territoires avaient justement un statut de dépendance.
Bonjour Bruno,
Oui, quelques rapides recherches confirment vos propos.
Je cite :
» « La colonie de Madagascar et dépendances est une colonie française ayant existé de 1897 à 1946, avant de devenir un territoire d’outre-mer jusqu’à 1958. Elle administrait le territoire de l’ancien protectorat français de Madagascar, auquel ont été rattachés successivement d’autres territoires sous souveraineté française… »
La colonie de Madagascar et dépendances (déjà ainsi nommée) s’est donc vue lui être à nouveau rattachés d’autres territoires par la suite.
Je vous rejoins en pensant que ces nouveaux territoires faisaient partie intégrante de La colonie, donc je viserai également l’entité et le singulier.
Cependant… il est vrai que le petit « ses » qui a été rajouté dans la phrase (et donc au milieu du nom même de l’entité) est perturbant, car de fait, il aurait pu se vouloir distinguer colonie et dépendances (ce qui aurait dans ce cas pu justifier l’emploi de l’accord pluriel)
En fait, je me dis que c’est tout simplement l’utilisation du possessif qui est ici impropre.
(Dirions-nous « Saint-Pierre et son Miquelon »?)