« Que+sujet » toujours suivi du subjonctif ? (Fut/fût ?)

Répondu

Bonjour à vous et bonne année !
J’aimerais avoir votre avis dans cette phrase :

« Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il fut/fût ainsi épargné. »

Je pencherais pour du passé simple car
« Le subjonctif imparfait est un temps simple qui exprime une action incertaine, non réalisée au moment où le locuteur s’exprimait. »
Hors, c’est certain, actuellement l’enfant a été épargné, l’action est bien réalisée. Le doute est simplement sur la personne ou la chose qui le protège.

Mais en regardant des exemple de textes contenant « pour qu’il fût » c’est toujours le subjonctif imparfait qui est utilisé (fût).

Donc voilà ma question, même si cela ne correspond pas à l’utilisation du subjonctif imparfait, dois-je tout de même l’employer simplement car il est suivi de « qu’il » ?

S’il existe une règle précise, je suis preneuse !

Ps: Protéger est à l’imparfait car c’est toujours le cas.

Merci à ceux qui prendront le temps de me répondre.

Lia Débutant Demandé le 8 janvier 2019 dans Conjugaison

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7 réponse(s)
 
Meilleure réponse

A. Le mode.
Pour choisir entre indicatif et subjonctif, vous ne trouverez pas de règle stricte à appliquer. Dans les grammaires, chacun y va de sa justification (c’est parce que ce n’est pas certain, c’est parce qu’à ce moment ce n’était pas encore certain…) Mais pourtant le futur incertain se met à l’indicatif (il viendra peut-être), le passé certain est souvent au subjonctif (bien qu’il soit venu)… La notion d’incertitude est sans doute intéressante à analyser, mais c’est tout sauf une règle. La règle pour le choix du mode est en réalité que la construction prime sur le sens : vouloir + subjonctif / savoir + indicatif / pour que + subjonctif / alors que + indicatif / bien que + subjonctif / croire + indicatif / ne pas croire + subjonctif (en général)… Quand on ne connaît pas un verbe ou une conjonction, ce qui est très rare pour un francophone, on cherche dans un livre quel mode il faut utiliser. Mais quand on parle français et qu’on hésite, on choisit à l’oreille, en changeant le temps. Pour qu’il est / pour qu’il fut ? Pour qu’il soit / pour qu’il fût ? Et on voit qu’avec « pour que » il faut choisir le subjonctif. Parmi les nombreuses utilisations de « pour que », il y en a qui ne sont pas des objectifs mais des constats, ce qui est le cas dans votre phrase, mais c’est la construction qui importe.

B. Les temps.
Il faut considérer deux choses, dans cet ordre : d’abord le rapport des temps entre les deux propositions (la principale et la subordonnée), et ensuite seulement la concordance des temps dans une transposition au passé.

a) Vu du présent
Tournure active
1. Ce qui s’est passé : Le juge a été clément. Il a libéré l’accusé.
1. Nuance sur la cause : Le juge est clément. Il a libéré l’accusé.
Tournure passive
2. Ce qui s’est passé : Le juge a été clément. L’accusé a été libéré.
2. Nuance sur la cause : Le juge est clément. L’accusé a été libéré.
Tournure avec un adjectif
3. Ce qui s’est passé : Le juge a été clément. L’accusé est désormais libre.
3. Nuance sur la cause : Le juge est clément. L’accusé est désormais libre.

b) Vu du passé avec concordance des temps
Tournure active
4. Ce qui s’est passé : Le juge avait été clément. Il avait libéré l’accusé.
4. Nuance sur la cause : Le juge était clément. Il avait libéré l’accusé.
Tournure passive
5. Ce qui s’est passé : Le juge avait été clément. L’accusé avait été libéré.
5. Nuance sur la cause : Le juge était clément. L’accusé avait été libéré.
Tournure avec un adjectif
6. Ce qui s’est passé : Le juge avait été clément. L’accusé était désormais libre.
6. Nuance sur la cause : Le juge était clément. L’accusé était désormais libre.

On comprend par votre « Protéger est à l’imparfait car c’est toujours le cas » que vous voulez dire que vous choisissez un temps de continuité et non un temps d’action (il protégeait et non il a protégé / il est clément et non il a été clément). Ne retenons donc dans la suite que cette forme.

C. Mode et temps ensemble.
Coordonnons maintenant avec « pour que + subjonctif ».

a) Au présent :
1. Sans doute le juge est-il clément pour avoir ainsi libéré l’accusé.
2. Sans doute le juge est-il clément pour que l’accusé ait ainsi été libéré. (subjonctif passé)
3. Sans doute le juge est-il clément pour que l’accusé soit désormais libre. (subjonctif présent)

b) Transposé au passé avec concordance des temps (le subjonctif passé devient subjonctif plus-que-parfait, le subjonctif présent devient subjonctif imparfait) :
4. Sans doute le juge était-il clément pour avoir ainsi libéré l’accusé.
5. Sans doute le juge était-il clément pour que l’accusé eût ainsi été libéré. (subjonctif plus-que-parfait)
6. Sans doute le juge était-il clément pour que l’accusé fût désormais libre. (subjonctif imparfait)

On voit que j’ai fait la nuance « avoir été libéré » / « être libre », c’est-à-dire « participe passé dans une forme passive » / « adjectif ».
Comment faire avec « épargné » ? Il est vaguement possible, par abus, de considérer ce participe passé comme un adjectif (les femmes sont survivantes, donc épargnées) mais formellement c’est un participe passé (les femmes ont été épargnées), et c’est en tant que participe passé à la forme passive qu’il faut le conjuguer.

Choisissez donc la tournure 5.
Sans doute le juge était-il clément pour que l’accusé eût ainsi été libéré.
Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il eût ainsi été épargné.
Notez que l’adverbe « ainsi » se place plutôt après le premier auxiliaire, car c’est au verbe conjugué qu’il s’applique. Votre suggestion « pour qu’il eût été ainsi épargné » me semble malgré tout valide.

Si vous préférez la tournure 6, changez le mot « épargné » en un participe passé qui puisse être traité comme un adjectif, par exemple « sauvé » (on peut dire « il est sauvé »).
Sans doute le juge était-il clément pour que l’accusé fût désormais libre.
Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il fût ainsi sauvé.

D. Méthode.
Vous êtes en train d’écrire une histoire en ayant fait le choix de l’écrire au passé simple, le temps du récit. Mais il n’y a aucun rapport avec le temps de l’auteur. Pour chaque difficulté, vous pouvez donc travailler votre phrase au présent et articuler librement les temps entre eux selon le sens que vous souhaitez, et seulement ensuite la transposer au passé en appliquant les règles relativement strictes de la concordance des temps.

numeric Maître Répondu le 8 janvier 2019

Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il soit/fût ainsi épargné.

La conjonction « pour que » demande le subjonctif ; donc pour la concordance des temps, le subjonctif imparfait est correct. Le subjonctif présent est accepté.

joelle Grand maître Répondu le 8 janvier 2019

Merci beaucoup Joelle !
Et le subjonctif plus que parfait, est-il lui aussi correct ?
« Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il eût été ainsi épargné. »

Cela m’inspire davantage ce côté « incidence » du passé sur le présent, il a été épargné par le passé donc il va bien aujourd’hui. Êtes-vous du même avis ?

ps : Je ne trouve pas comment éditer mon message, ni mettre ma question en résolu : est-ce possible ?

Lia Débutant Répondu le 8 janvier 2019

Pas le PQP qui correspond à une action passée antérieure à une autre action passée.

le 8 janvier 2019.

Merci beaucoup Numeric pour cette réponse très détaillée !
Donc, puisque je souhaite garder le terme d' »épargner », je choisis alors le subjonctif plus que parfait.

Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il eût ainsi été épargné.

Mais quid de la remarque de joelle :
« Pas le PQP qui correspond à une action passée antérieure à une autre action passée. »

Le choix du plus que parfait est donc incorrect, puisque l’enfant a été épargné « grâce » à la protection d’une divinité, même si cela reste une supposition, l’action d’avoir été épargné suit celle de la protection, donc c’est « protéger » qui est antérieur à « épargner », donc je ne peux pas utiliser le plus que parfait, non ?

Et concernant cela :

« La règle pour le choix du mode est en réalité que la construction prime sur le sens : vouloir + subjonctif / savoir + indicatif / pour que + subjonctif / alors que + indicatif / bien que + subjonctif / croire + indicatif / ne pas croire + subjonctif (en général)… »

Y a t-il un endroit où toutes ces règles de construction sont listées ?

Lia Débutant Répondu le 9 janvier 2019

Merci beaucoup Numeric pour cette réponse très détaillée !
Donc, puisque je souhaite garder le terme d' »épargner », je choisis alors le subjonctif plus que parfait.

Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il eût ainsi été épargné.

Mais quid de la remarque de joelle :
« Pas le PQP qui correspond à une action passée antérieure à une autre action passée. »

Le choix du plus que parfait est donc incorrect, puisque l’enfant a été épargné « grâce » à la protection d’une divinité, même si cela reste une supposition, l’action d’avoir été épargné suit celle de la protection, donc c’est « protéger » qui est antérieur à « épargner », donc je ne peux pas utiliser le plus que parfait, non ?

Et concernant cela :

« La règle pour le choix du mode est en réalité que la construction prime sur le sens : vouloir + subjonctif / savoir + indicatif / pour que + subjonctif / alors que + indicatif / bien que + subjonctif / croire + indicatif / ne pas croire + subjonctif (en général)… »

Y a t-il un endroit où toutes ces règles de construction sont listées ?

Lia Débutant Répondu le 9 janvier 2019

« Pas le PQP qui correspond à une action passée antérieure à une autre action passée. »
C’est très réducteur comme utilisation du plus-que-parfait.

Le plus-que-parfait peut établir une chronologie entre deux actions, c’est vrai. On me donne un livre que j’ai déjà lu. On m’a donné un livre que j’avais déjà lu.

Mais ici le plus-que-parfait est juste du passé dans le passé. Et un verbe même isolé suffit à justifier son utilisation.
Dans un récit au présent, on peut dire : cet enfant a été épargné.
Donc dans un récit au passé, on doit dire : cet enfant avait été épargné.
Récit au présent : Hier, il a été épargné.
Récit au passé : La veille, il avait été épargné.
Antériorité par rapport au temps du récit, et non par rapport à un autre verbe.

Qu’il y ait un autre verbe dans la phrase (protéger) ne perturbe absolument pas cette logique, d’autant plus qu’il n’est pas conjugué dans un temps d’action ponctuelle mais dans un imparfait de durée.

Voyons maintenant si, au passé, vous pouvez utiliser le plus-que-parfait pour une chronologie entre deux verbes. On maintient le plus-que-parfait pour le verbe épargner, parce que c’est le temps adapté (passé dans le passé). C’est pour le premier verbe qu’on peut tenter de montrer une antériorité.
Pour faciliter les choses, choisissons deux verbes clairement d’action et ponctuels, à la voix active, la première action se situant avant la seconde.
Raconté depuis le présent, au passé composé :
1. La divinité a interposé son bouclier. 2. La flèche a épargné l’enfant.
La flèche a épargné l’enfant car la divinité avait interposé son bouclier. (plus-que-parfait d’antériorité, d’accord)
Raconté depuis le passé, au plus-que-parfait :
1. La divinité avait interposé son bouclier. 2. La flèche avait épargné l’enfant.
La flèche avait épargné l’enfant car la divinité avait auparavant interposé son bouclier. (comme il n’existe pas de plus-que-plus-que-parfait, on se débrouille en ajoutant un adverbe)
Conclusion : dans un récit au passé, dans lequel on utilise du plus-que parfait pour les actions déjà passées, il est très difficile d’utiliser de surcroît du plus-que parfait pour établir un ordre chronologique entre deux actions antérieures au temps déjà passé du récit.

========

Question 2 : Je ne connais pas de liste de verbes ou conjonctions avec le mode nécessaire. Je constate que les dictionnaires ne le disent pas. Il existe effectivement des cas où les deux sont possibles (j’admets qu’il est, j’admets qu’il soit), les listes seront donc fatalement incomplètes. Mais souvent, il n’y a simplement pas le choix, comme avec « pour que » + subjonctif obligatoire, c’est déjà une bonne base.
Quelqu’un d’autre aura peut-être une réponse si vous ouvrez une nouvelle question.

numeric Maître Répondu le 10 janvier 2019

Merci beaucoup Numeric !
Bon, eh bien c’est donc le plus que parfait qui l’emporte :
Peut-être qu’une divinité protégeait cet enfant pour qu’il eût ainsi été épargné.
Merci encore.

Lia Débutant Répondu le 11 janvier 2019

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