RE: Participe passé suivi d’un infinitif
Bonjour, bonsoir,
Je n’arrive à comprendre en quoi cette phrase est fausse :
« La victime, plusieurs voyageurs l’ont vue agresser sans esquisser un geste. »
C’est pourtant « la victime » qui réalise l’action exprimée par l’infinitif « agresser »… Ou alors ai-je mal compris le sens de la phrase ? Selon moi, les voyageurs ont vu la victime agresser (une personne).
P.-S. : la phrase est tirée du quiz du projet Voltaire.
Dans l’exemple, ils mettent le mot « victime » pour montrer qu’elle est le COD et non l’agent (le sujet) de « agresser ».
– Je vois le chat manger la souris.
– Je vois manger la souris (par le chat).
La construction de la première phrase est courante, celle de la seconde est également valide.
– Ce maçon, je l’ai vu construire ce mur.
– Ce mur, je l’ai vu construire (par ce maçon).
Dans la première phrase, le pronom « le » mis pour « ce maçon » est COD de « vu ».
Dans la seconde phrase, le pronom « le » mis pour « ce mur » est COD de « construire ».
Se pose maintenant la question de l’accord du participe passé « vu » utilisé avec l’auxiliaire « avoir ».
Qu’il y ait en début de phrase le COD de l’infinitif n’importe pas, mais qu’il y ait en début de phrase le COD du participe passé « vu » demande l’accord.
– La souris, je l’ai vue manger un fromage (le pronom féminin est COD de « vue »).
– La souris, je l’ai vu manger par le chat (le pronom féminin n’est pas COD de « vu » mais de « manger »).
Ces maçons, je les ai vus construire cette maison (le pronom pluriel mis pour « ces maçons » est COD de « vus »).
Cette maison, je l’ai vu construire (le pronom féminin mis pour « cette maison » n’est pas COD de « vus » mais de « construire »).
Les jeunes, on les a vus agresser la victime (le pronom pluriel est COD de « vus »).
La victime, on l’a vu agresser par des jeunes (le pronom féminin n’est pas COD de « vu » mais de « agresser »).
La règle est simple à appliquer, c’est toujours la même, il n’y en a pas de nouvelle ; ce qui est plus difficile est d’admettre cette construction qui semble parfois tordue.
Si on a du mal avec « la souris que j’ai vu manger » (on préférerait « vue se faire manger » ou « vue être mangée ») ou « la victime que j’ai vu agresser » (une personne peut être sujet ou COD de agresser), on peut se raccrocher à une phrase d’aspect plus naturel et sans ambiguïté, et la retenir comme modèle : « cette ville, je l’ai vu construire », « une ville que j’ai vu construire », où on n’accorde pas, puisque « une ville que » n’est pas COD de « voir » mais de « construire ».
Une explication très claire Adrian, pour un cas difficile et qui fait couler beaucoup d’encre. (Il est vrai que l’encre ne coule plus… )
Lorsque le verbe « voir » est dans son usage « plein » son participe passé s’accorde.
Je les ai vus construire cette maison
Lorsqu’il est semi-auxiliaire, son participe passé ne s’accorde pas
Cette ville je l’ai vu construire : « voir » modalise le verbe et ne correspond pas tout à fait à une perception : il indique que l’énonciateur peut témoigner de cette construction. Il a pour cela une perception globale (et non seulement visuelle) de la construction de la ville (bruits, informations, travaux ponctuels…) qui d’ailleurs a pu s’étaler sur un très long temps.
Ces gens, je les ai vus construire une ville. Cette ville, je l’ai vu construire. C’est le même verbe voir ! L’accord de « vu » n’a rien à voir avec votre perception personnelle, avec vos semi-auxiliaires, votre imaginaire, l’aspect visuel, la modalité ou les bruits. L’accord, c’est selon la place du COD, bon sang !