RE: J’ai passé ?
On conjugue ainsi : je suis passé te voir et j’ai passé mon permis.
Cependant, on rencontre parfois, en littérature, des formules telles que « je n’ai pas passé par cette porte ! »
Cet emploi est-il correct ?
pourtant j’aurais préféré « j’ai passé une porte » plutôt que » j’ai passé par une porte ». Voir plus loin paragraphe souligné.
Le CNTRL donne :
1) P. méton. Être, avoir passé. Avoir fini de passer, avoir disparu.
2.[Avec compl. d’obj. désignant un obstacle] Qqn1/qqc.1passe qqc.2.Traverser, franchir.
c) En partic. Passer une grille, une porte, un seuil. Franchir une grille, une porte, un seuil pour entrer ou sortir. Ils traversèrent la salle à manger carrelée de rouge, passèrent une double porte capitonnée et s’enfermèrent dans une petite pièce où deux grands fauteuils de cuir les accueillirent (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.127).
Hanse et Blampain, « Nouveau Dictionnaire des difficultés du français moderne »
LORSQUE MONTER EST EMPLOYÉ INTRANSITIVEMENT :
a- S’il s’agit d’une PERSONNE, l’auxiliaire ÊTRE l’emporte nettement, même pour l’action en cours.
* Après ÊTRE MONTÉ dans un wagon de troisième classe. (Butor)
* Ils SONT alors MONTÉS à l’échelle, sur le toit.
* Ils SONT MONTÉS à l’assaut.
Mais :
* Il est hors d’haleine pour AVOIR MONTÉ trop vite. (Académie)
* Un jour, avec Monsieur l’Abbé, j’ai monté là. (Gide)(Le Robert des difficultés)
Vous vous attachez surtout au verbe passer pris transitivement, or ce qui m’intéresse c’est l’emploi intransitif (j’ai passé par là).
Dès que l’on parle littérature, effectivement, tout semble permis, même les fautes de syntaxe (et pourtant…). Vous employez d’ailleurs le mot très bien choisi « licence ».
L’ exemple que vous choisissez (il est hors d’haleine pour avoir monté trop vite) met l’accent sur le verbe d’action et ainsi le verbe avoir se justifie.
Grevisse cite des exemples avec passer intransitif employé avec avoir :
« Avoir reste possible : Tous les domestiques qui ont passé dans cette maison (Colette et Willy, Claud. s’en va,). — Tota a passé outre à la volonté de sa mère (Mauriac, Ce qui était perdu). — Elles travaillaient en amateurs tandis que j’avais passé professionnelle (Beauvoir, Mém. d’une jeune fille rangée,). — Il a passé à côté de ce que l’auteur voulait dire ( R.-L. Wagner, Vocabul. fr.). — J’’ ai passé sous une échelle le matin (Chr. Rochefort, Repos du guerrier). [À la même page : J’étais passée sous une échelle. ]— Il avait passé à côté du bonheur en s’écartant de cette charmante Ida ( Dhôtel, Des trottoirs et des fleurs,). — Sigismond […] a passé devant un café ( Pieyre de Mand., Marge). — Même si les plus illustres d’entre eux n’avaient jamais passé en Alsace (C h. Muller, Voyageurs romantiques en Alsace,). — La forme du pluriel a passé au singulier ( Fouché, Phon. hist. du fr.). — Particulièrement inattendu : Pâques avait passé depuis quatre semaines (Jammes, Rosaire au soleil). » (Le Bon usage. § 813).
Peut-on se permettre cela en langage courant, je ne le crois pas.
Enfin, la phrase « je n’ai pas passé parcette porte » provient d’une traduction des Frères Karamazov de Dostoïevski. Le par peut être alors cautionné.
D’autre part, le contexte le justifie : en effet Dimitri veut dire au juge et au procureur : « je ne suis (je n’ai ?) pas passé par là ». Ce qui importe, c’est le trajet qu’il a suivi. Ainsi, le par me paraît tout à fait acceptable. C’est une subtilité qui me convient.
