Une heure et élision
Bonjour, dans la phrase « ils avaient marché près d’une heure », y a-t-il élision ou doit-on écrire près de une heure ? Merci.
La règle à appliquer est celle de la non-élision de la préposition devant un numéral, ordinal ou cardinal. Cette disposition dérogatoire vise à bien identifier ces adjectifs dans leur rôle et à éviter des confusions oralement car il s’agit de chiffres précis qui doivent être bien compris. Il faut empêcher l’hésitation que peut engendrer l’élision, surtout avec un mot court. À ce titre, les cas de huit (huitième) et onze (onzième) sont bien connus : hors quelques expressions folkloriques (comme le bouillon-d’onze-heures), on ne fait pas l’élision.
Le cas de un est plus particulier car il se confond avec l’article indéfini. Mais la philosophie est la même : on élide l’article, mais pas une valeur numérale (adjectif ou nom). On écrit donc bien : un enfant de un an. On peut facilement le vérifier dans nombre de tournures : compter de un à cent ; à notre loterie du jour, c’est le un qui gagne ; l’affaire fait la une des journaux (et non l’une).
La distinction entre article et adjectif peut néanmoins s’avérer délicate : Deux précautions valent mieux qu’une. Dans ce proverbe, la langue populaire a favorisé l’article, sous-entendant « qu’une seule précaution ». On constate, facilité de prononciation aidant, que la langue orale privilégie alors systématiquement l’élision…
PS Le fait qu’une règle soit régulièrement enfreinte, par ignorance ou négligence, ne rend pas l’infraction légitime pour autant, même une fois habillée par Grevisse. La notion « d’insistance sur la quantité » est assez étrange et selon moi inventée pour la circonstance. Devant une unité de mesure, c’est abusif.
Pour compléter ma réponse, voir la position de l’Académie française sur le sujet (exemples avec an et mètre). Pour l’absence d’élision dans « de une heure » voir ici plus de deux cents exemples tirés la littérature et de publications du XXe siècle (faire défiler les pages en bas de la liste).
Les deux sont possibles, vous avez donc le choix, néanmoins un énoncé où l’élision n’est pas faite sera moins neutre qu’un où elle l’est. On voit d’ailleurs que pour ce cas précis, l’usage opte très nettement pour l’élision. Ce qui n’est guère surprenant puisque une est ici déterminant et que dans ce cas l’élision est la norme (sauf pour huit et onze pour lesquels elle est interdite), et la non élision facultative sert à souligner la valeur numérique de un/une (vs le déterminant indéfini).
Dans les exemples donnés par Chambaron (compter de un à cent ; à notre loterie du jour, c’est le un qui gagne ; l’affaire fait la une des journaux), un(e) n’est pas déterminant, mais substantif dans ce cas l’élision ne se fait jamais.
Extrait du Bon Usage:
Certains sont moins tolérants que Grevisse et estiment que la non-élision est fautive :
Cette position reste assez isolée.
On trouvera au post 31 de ce fil un état des lieux sinon complet en tout cas fourni sur la question.