RE: Transitivité d’un verbe

Bonjour,
Dans la phrase :
Ma soeur reçoit la visite de ses amies anglaises tous les dimanches.
Le verbe est transitif direct, n’est-ce pas ?

Oktobrina Débutant Demandé le 12 juillet 2023 dans Général
4 Réponses

Un verbe transitif met en relation plusieurs éléments, par exemple deux, dans une phrase : le sujet et un complément.
— Martine mange une gâteau, Martine va à Paris, Martine se contente d’un fruit…
L’analyste-programmeur qui modélise la situation dessine sur un schéma Martine, une gâteau, la ville de Paris, un fruit, et met des flèches symbolisant les relations, qu’il nomme « manger », « aller à », « se contenter de »…
Pour une phrase telle que :
— Martine reçoit la visite de son amie
il dessinerait évidemment Martine, son amie, et une flèche qu’il nommerait « recevoir la visite de ».
Il n’y a en effet que deux choses en relation dans votre phrase : Martine et son amie.
Si vous avez lu un livre expliquant le verbe transitif et le complément d’objet par la mise en relation entre deux éléments de la phrase, le sujet et son complément, on conçoit très bien que vous préfériez considérer Martine comme le sujet, son amie comme le complément objet, et « recevoir la visite de » comme l’action.
C’est une façon simple et rigoureuse de respecter la notion de transitivité et la notion d’objet.

[Digression. On accepte d’autant mieux cette idée qu’on perçoit que le verbe seul ne veut (plus) rien dire, et qu’un verbe qui ne veut rien dire ne risque pas d’avoir de COD. Inversons donc la phrase, remplaçons « recevoir la visite de » par « rendre visite à », car autant « recevoir » est parlant, autant « rendre » ne l’est pas :
— Son amie rend visite à Martine
L’action, le procès, la mise en relation entre deux éléments, ce n’est pas « rendre », avec un complément qui serait « visite », mais « rendre visite », avec un complément qui est « Martine », et le mot « visite » n’est pas COD.
On ne peut pas le pronominaliser :
— La rend-elle ? — Rendre quoi ? — La visite…
On ne peut pas faire du complément un sujet :
— La visite à Martine est rendue ? — La visite est rendue à Martine ?
Si on a trois éléments (Martine, un livre, son amie) mis en relation dans :
— Son amie rend le livre à Martine
on n’en n’a que deux (Martine, son amie) dans :
— Son amie rend visite à Martine
Le mot « visite » se rattache ici au verbe pour en compléter le sens, mais il n’est pas un élément mis en relation avec le sujet par le verbe, et par définition il n’est pas un complément objet.
La preuve en est qu’on dit avec rigoureusement le même sens :
— Son amie visite Martine]

Syntaxiquement, on fait souvent semblant que le verbe est transitif direct, et qu’il a un COD, alors que c’est plutôt un complément adverbial modifiant le sens du verbe, et non un objet sur lequel porte le verbe, l’objet sémantique se trouvant plus loin dans la phrase, comme vous l’avez bien repéré.
Ce n’est donc pas du tout votre compréhension qui est cause, c’est le fait que les livres de grammaire désignent par des mêmes mots et finissent par mélanger des notions différentes pourtant assez simples. Votre question est la preuve que pour votre part vous faites la différence, et vous avez raison.
Sur ce site comme ailleurs, presque tout le mode a renoncé à conserver leur sens strict aux mots « transitivité » et « objet ». Le mieux aurait alors été de trouver d’autres mots : au lieu de « verbe transitif », on dirait « verbe suivi d’un autre truc », et au lieu de « complément objet », on dirait « le truc qui suit le verbe », et ce serait bien plus clair.
Notez que concernant la règle sur l’accord du participe passé, on fait comme si « le truc qui suit le verbe » était un « complément objet » quand on le déplace de façon hasardeuse avant à un temps composé, et on a même pour justifier cela inventé l’oxymore « COD syntaxique » :
— La visite que Martine a reçue de son amie
— La visite que son amie a rendue à Martine

CParlotte Grand maître Répondu le 13 juillet 2023

Vous dites que ce qui suit le verbe (en l’espèce visite) est « [u]n complément adverbial modifiant le sens du verbe », hum non, c’est le prédicat de la phrase, un prédicat nominal donc, précédé d’un verbe dit « support ». Ce verbe (sans contenu sémantique, ou à très pauvre contenu sémantique) sert – essentiellement – de support aux informations de temps, de mode, de nombre et de personne.

Vous dites « l’objet sémantique se trouvant plus loin dans la phrase, comme vous l’avez bien repéré », euh non, dans la phrase donnée par Oktobrina, l’objet sémantique, il se trouve avant, puisque c’est le sujet syntaxique. Ce qui se trouve « plus loin dans la phrase », c’est l’agent de la visite :
Ma sœur reçoit la visite de ses amies anglaises tous les dimanches.
Qui fait l’action de visiter ? ses amies anglaises, c’est donc l’agent sémantique, qui est COI ou CdN syntaxique.
Qui est visité ? Ma sœur, c’est donc le patient sémantique, qui est le sujet syntaxique.

On constate que ce verbe (le verbe donc, et non le prédicat nominal) permet à l’instar de la voix passive d’inverser les rôles = de faire monter l’objet sémantique en position de sujet syntaxique et de mettre l’agent sémantique en position syntaxique oblique (voire de ne pas l’exprimer) :
Ma sœur reçoit la visite de ses amies anglaises tous les dimanches = Ma sœur est visitée par ses amies anglaises tous les dimanches.

Vous dites  « et le mot « visite » n’est pas COD », eh bien si, ce qui suit un verbe support est complément de ce verbe, simplement la nature atypique de cette forme fait qu’elle n’accepte pas toutes les manipulations que supporte un objet typique. En revanche elle est par exemple passifiable (avec rendre), ce qui est une marque typique de l’objet, comme quoi.

le 14 juillet 2023.
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