RE: Pronom en avec le verbe essayer

Bonjour,

Une personne apprenant le français a récemment tenté d’utiliser le pronom en de la façon suivante :

« C’est facile de venir en tram. Si tu as le temps, tu peux en essayer. »  (essayer de venir)

Je n’arrive pas à cerner la raison pour laquelle cet usage est incorrect.

Est-ce que le sens du verbe essayer est simplement de nature à ne pas requérir de complément de la sorte ?  Si oui, y a-t-il d’autres verbes pertinents à relever dans le même cas ?

Puisqu’on peut tout à fait dire « Ils parlent de venir en tram. » –> « Ils en parlent. »

Merci d’avance pour tout éclairage !

Legue67 Amateur éclairé Demandé le 8 mars 2024 dans Question de langue
6 Réponses

Un verbe transitif direct peut avoir pour complément un infinitif introduit par « de ».
Le mot « de » n’introduit pas toujours un COI.
Le complément d’un verbe introduit par « de » est parfois un COI, et parfois un COD.
Le pronom « en » s’utilise pour remplacer un [infinitif COI], mais pas pour remplacer un [infinitif COD introduit par « de »].
Pour faire la différence, il faut voir si on peut remplacer [« de » + infinitif] par « cela » ou par « de cela ».
a) Si on peut remplacer « de + infinitif » par « cela », on a un verbe transitif direct :
— Il refuse de venir. Il refuse cela.
— Il choisit de venir. Il choisit cela.
— Il a tenté d’utiliser le pronom « en ». Il a tenté cela.
— Il a essayé de venir en tram. Il a essayé cela.
b) Si on peut remplacer « de + infinitif » par « de cela », on a un verbe acceptant un COI qui peut se pronominaliser en « en » :
— Il a parlé de venir. Il a parlé de cela. Il en a parlé.

Pour un étranger qui ne sait pas catégoriser les verbes français, je ne sais pas quelle méthode conseiller. Votre ami connaît-t-il les notions de verbe transitif, de verbe transitif direct, de verbe transitif indirect ? Si oui, il trouvera dans le dictionnaire « ESSAYER, verbe trans. », ce qui signifie « verbe transitif direct », car la notion de verbe transitif indirect est absente de la plupart des dictionnaires. Il suffit qu’il soit écrit « verbe trans. » pour que l’infinitif COD ne puisse pas être pronominalisé en « en ».
On peut aussi conseiller à son prof de systématiquement présenter chaque verbe avec ses constructions : choisir de partir, choisir cela ; essayer de venir, essayer cela ; parler de venir, parler de cela, en parler ; avoir peur de venir, avoir peur de cela, en avoir peur…
Pour répondre à votre question « y a-t-il d’autres verbes qui… », oui bien sûr, il y en a plein, mais il ne faut pas chercher une liste des verbes dont l’infinitif COD est introduit par « de », du type : demander, refuser, tenter, essayer, oublier… et cent autres. Cette liste ne serait jamais exhaustive, et surtout, elle ne listerait pas des exceptions, car ce n’est absolument pas une exception qu’un infinitif COD soit introduit par « de », c’est même un principe général dans la plupart des cas.

Il y a certainement de bonnes raisons aux deux constructions, avec ou sans « de » pour introduire l’infinitif COD, mais vous ne les trouverez pas dans un simple manuel de grammaire. Il y a deux siècles on disait encore « il a souhaité de me voir » mais on dit aujourd’hui « il a souhaité me voir ». On dit « je souhaite vivre heureux » mais « je vous souhaite de vivre heureux ». Il y a des articles et des livres sur ce sujet. Quand le « de » disparaît, c’est qu’on passe de la notion de verbe transitif avec son COD « de + infinitif » à celle de verbe pseudo-auxiliaire introduisant un verbe principal. On passe de [je souhaite [de faire] cela] à [je [souhaite faire] cela]. Dans « j’envisage de partir », le verbe « envisager » a un sens plein et un COD qui est « de partir ». Dans « je pense partir », le verbe « penser » est à appréhender comme un semi-auxiliaire du verbe « partir ». Les infinitifs COD sont largement et logiquement introduits par « de », ce n’est pas exceptionnel, c’est la norme.

Votre ami a été abusé par des règles simplifiées à outrance, totalement fausses et bêtifiantes, largement relayées, jusque sur notre site, du type « de = dont = en ».

CParlotte Grand maître Répondu le 8 mars 2024
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