RE: modèles (femmes) provocatrices ou provocateurs ?

Bonjour,
je suis dans une impasse, voici ma phrase :
« les modèles des photographes de lingerie sont vite catalogués de provocatrices » Dans cette phrase, « modèle » est un nom masculin mais désigne des femmes. Est-ce logique d’accorder « catalogués » au masculin pluriel ? et faut-il dire provocatrices ou provocateurs ? Merci !

MarionDelugeau Débutant Demandé le 8 septembre 2021 dans Accords
8 Réponses

On peut faire un accord sylleptique, c’est à dire accorder selon le sens.
BDL :
La syllepse peut aussi être de nature grammaticale. Elle désigne alors un accord grammatical fait selon le sens ou la logique, et non selon les règles habituelles. Ce procédé, aussi appelé syllepse grammaticale, peut porter sur l’accord en genre, en nombre ou en personne.
Exemple :– Une personne me disait un jour qu’il avait une grande joie et confiance en sortant de confession. (Pascal)exemple (wikipédia) :  Une estafette arriva en trombe. On l’interrogea mais il ne voulut parler d’abord qu’au général
La pauvre Barbe-bleue se doutait bien de quelque chose, mais il ne savait pas de quoi. (A. France.)

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 Grevisse et Goosse font tous deux grand usage de la syllepse, de nombre, de genre et de personne[…].La syllepse consiste à faire l’accord d’un mot, non avec le mot auquel il se rapporte selon les règles grammaticales, mais avec le terme qu’on a dans l’idée […}Goosse distingue trois cas d’accord sylleptiques dont le dernier, intitulé : accord qui « contredit le genre et/ou le nombre du donneur », constitue la syllepse proprement dite

[…]les syllepses occasionnelles, avec les noms de profession ou les titres, dont le référent peut être homme ou femme (ce mannequin est charmante, Colette), les noms collectifs singuliers (Il y a assez de monde qui sont venus me soir, Hugo), les sujets autonymiques (Les Dieux ont soif est un livre d’une maîtrise absolue, Thibaudet), les indications numériques et indications d’âge (Dix heures sonna, R. Vailland).

Tara Grand maître Répondu le 8 septembre 2021

Vos trois exemples « une personne […] il avait », « une estafette […] il ne voulut », « la pauvre Barbe-Bleue […] il ne savait » ne sont pas des syllepses. Désigner un homme par un nom féminin (la victime), une femme par un nom masculin (l’agresseur) n’a jamais empêché d’utiliser des pronoms à suivre selon le sexe de la personne. Il n’y a aucune syllepse dans le fait d’utiliser un nom masculin ou un nom féminin pour désigner une personne, puis à utiliser un pronom conforme à son sexe et non au dernier substantif utilisé.
— C’est un animal sauvage, c’est une brute ; cette brute a tué ; il est méchant.
— C’est une brute, un vrai animal ; cet animal a tué ; elle est méchante.
Il n’y a non plus aucune syllepse à ne pas accorder selon le nom ou le surnom : Le Pen est jolie. La Fayette est mort. (La) Barbe-bleue est méchant. C’est juste leur nom. Un nom masculin peut représenter une femme. Un nom féminin peut représenter un homme, et vous le savez.
Cela ne s’appelle pas une syllepse. Vous avez défendu ce principe dans plusieurs de vos réponses sur ce site (« l’attribut ayant un genre différent du sujet, ce n’est pas une syllepse, c’est juste le respect syntaxique que le sexe du sujet et le genre de l’attribut sont deux réalités indépendantes l’une de l’autre »), pourquoi changer d’avis aujourd’hui ? Si un roman commence par « une personne arriva », que cette personne est un homme, et qu’on trouve mille fois le mot « il » dans le roman, direz-vous qu’il y a mille syllepses ?
Peut-être êtes-vous Nathalie Fournier, ou peut-être ne faite-vous que la piller. Cela importe peu dans la mesure où elle-même ne fait que compiler les grammairiens en n’en retenant que ce qui l’arrange.
Une belle syllepse, c’est « l’ennemi fourbissait leurs armes », « cette personne est gentil », « du monde qui sont venus »… C’est violent, c’est rare, c’est réputé incorrect a priori, mais dans certains cas c’est possible.
La formule « ce mannequin est charmante » (écrite en 1922) passera dans le domaine public en 2024, et nous examinerons ensemble le texte, mais déjà je vous informe que Colette ne faisait que jouer avec cette phrase, interrogeant la construction au féminin. C’est extrêmement malhonnête de présenter cela comme un usage en 1922.

Quelle est votre réponse : catalogués ou cataloguées ? provocateurs ou provocatrices ?

le 8 septembre 2021.
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