RE: J’aimerais à savoir
Bonjour,
Je lisais « Les Hauts de Hurle-Vent » quand j’ai rencontré la phrase suivante :
J’aimerais à savoir l’histoire de cette jeune et jolie veuve.
Cette tournure me laisse perplexe. Qu’en pensez-vous ?
Ce qui vous étonne est-il « aimer à » ? C’est très fréquent.
— Elle aime à rire, elle aime à boire (vieille chanson)
— …elle avait aimé à recevoir des lettres. (Hugo)
— … elle était purement moqueuse ; elle aimait à déchirer, à mordre, non pour m’amuser, mais pour satisfaire un goût. (Balzac)
— Ah ! cette voix aigre, glapissante, qu’on aimerait à faire rentrer, dans la bouche, d’un coup de poing… (Mirbeau)
— …que j’aimerais à me sentir emportée dans leur silencieux tourbillon ! (Zola)
Ce qui vous étonne est-il « savoir l’histoire » ?
Peut-on peut savoir un vélo, savoir un pays, savoir une chose ? Ou selon vous on ne peut se servir de ce verbe que pour introduire une proposition complétive ou une interrogation indirecte ? : je sais qu’il viendra, je sais comment il est venu, je ne sais pas s’il viendra… C’est effectivement l’usage actuel principal du verbe « savoir ».
Mais « savoir » peut aussi traduire une capacité à faire :
— je sais faire la cuisine
Ou la connaissance personnelle qu’on a d’une chose :
— je sais toutes les difficultés que tu as eues…
— je sais ma poésie par cœur
— je sais un peu l’italien (Dumas)
— Je sais un livre qui a déjà traversé un siècle et demi et qui… (Stendhal)
Parfois cette formulation pour traduire la connaissance qu’on a d’une chose est seulement littéraire ou poétique :
— Sur Montmartre je sais un coin pittoresque et encombré qui est de l’Alger pur. (Daudet)
— … je sais un chant d’amour, Triste et gai tour à tour. (Brizeux)
Pour ce qui est de votre phrase, je pense que si on m’a appris son histoire, que j’ai appris son histoire, alors c’est une formule assez simple et ordinaire que de dire : je sais son histoire.
Il n’y a évidemment aucun rapport entre votre question et le mot « assavoir », qui n’est qu’une graphie ponctuelle disparue depuis longtemps de « à savoir » et signifiant « c’est-à-dire » ; ou un équivalent de « connaître » qui n’existe que dans l’expression « faire assavoir » et nulle part ailleurs.
Et il n’y a évidemment aucun rapport non plus avec quelque considération que ce soit concernant l’ancienneté de telle ou telle traduction, car des milliers d’auteurs et de traducteurs utilisent librement les mots « aimer », « à », et « savoir ».