Confusion attribut du sujet / voix passive / passé composé
Bonjour,
J’enseigne à des CM2 et il y a un point de grammaire que je considère ne pas maitriser totalement car je n’arrive pas à avoir les idées claires dessus. J’espère que vous pourrez m’aider à me structurer.
Voici trois phrases :
A – Les lunettes sont venues par la poste.
B – Les lunettes sont cassées par la maitresse.
C – Les lunettes sont cassées en deux.
On a un passé composé, un présent à la voix passive, et un dernier que j’estime être un attribut du sujet.
De mon côté, je veux pouvoir expliquer cela au mieux à un élève.
Pour la A et le passé composé, j’arrive à donner du sens (en leur faisant apprécier le temps).
Pour la B et la C, j’ai du mal à leur faire comprendre la différence (sauf de leur dire de chercher le « par » mais je trouve que c’est une approche « mécanique » qui ne donne pas accès à la compréhension) Je me demande moi-même, au final, si on ne peut pas dire que « cassées » est aussi attribut du sujet de lunettes dans le cas B (mais utilisé ici dans une tournure passive)… ca serait tellement plus simple à expliquer, bien que je pense que j’ai faux.
Si quelqu’un se sent l’âme de me faire une petite explication. Merci beaucoup.
Belle journée à vous.
Je ne sais quel est le but de votre leçon, mais vos exemples sont assez techniques et subtils pour des CM2.
A passé composé actif– Les lunettes sont venues par la poste. La formulation est curieuse : les lunettes sont venues…comme si elles marchaient ou volaient, donc avec « Les lunettes sont arrivées par la poste ».
==>il s’agit de comprendre que la préposition « par » ne crée pas forcément un complément d’agent donc pas la voix passive. Ici, le problème n’est pas d’expliquer qu’il y a un passé composé, mais qu’il s’agit d’une voix active, les lunettes font l’action (contrairement à « les lunettes sont portées par le facteur », ici voix passive).
B présent passif – Les lunettes sont cassées par la maitresse. au présent, formulation un peu curieuse aussi car la valeur du présent signifie que la maîtresse est en train de casser les lunettes ou a l’habitude de casser des lunettes.
Mettons : « ont été cassées par la maîtresse », ou tout autre temps, ici il faut observer que les lunettes ne font pas l’action de casser, donc »par »introduit un complément d’agent. C’est une voix passive. Certes, il est clair que la voix passive comporte un participe passé construit avec l’auxiliaire être mais je dirais qu’il n’a pas – comme pour un attribut – valeur d’adjectif.
C présent actif – Les lunettes sont cassées en deux. Alors là, c’est bien subtil pour des CM2, il n’y a pas de passif ni de complément d’agent, mais le participe passé est en effet « attribut du sujet », il a valeur d’adjectif. On pourrait le remplacer par un autre adjectif : Les lunettes sont grandes ou petites.
De la même façon, si votre leçon porte sur la voix passive, dans « la chambre est tapissée de posters » , le complément d’agent n’est pas introduit par « par ».
Dites-moi si vous avez d’autres questions, si ce n’est pas clair.
A – Les lunettes sont venues par la poste.
B – Les lunettes sont cassées par la maitresse.
C – Les lunettes sont cassées en deux.
D’abord, notons effectivement l’aspect artificiel d’exemples hors contexte.
Mais il est vrai que ces trois phrases sont possibles.
En A la forme est active – noter le sens de « par » qui introduit ici le point de passage, un complément de lieu donc
En B la forme est passive (objet sujet+ verbe au présent voix passive + par + agent complément) et pour le vérifier on peut la transformer en phrase active >> la maîtresse casse les lunettes (agent sujet + verbe présent + objet complément)
On fait remarquer le sens différent de « par » qui introduit cette fois, un agent.
En C le PP, qui a valeur d’adjectif, est attribut il suffit de remplacer « cassées en deux » par un adjectif (comme le propose Joëlle)
On ne peut considérer en B que « cassées » est attribut simplement parce que le PP appartient à une forme verbale qui peut subir une transformation (du passif à l’actif) – ceci dit, tout PP a une valeur de « résultat », c’est peut-être ce qui influe sur votre analyse.
Ces notions me paraissent à moi aussi bien difficiles pour des enfants de cet âge.
En matière d’enseignement (j’ai été prof de lettres -et de langue-pendant de nombreuses années), j’ai pu constater qu’il faut absolument séparer l’étude d’éléments trop proches. Sinon, la confusion est inévitable. Par exemple, il est aberrant de rapprocher les homonymes. Si on prend « a » et « à », par exemple : ils apparaissent toujours dans des contextes différents et tous les exercices qui les rapprochent en demandant qu’on les distinguer, produit l’effet inverse.
Dans le cas qui nous intéresse, je me permets de vous suggérer de ne pas rapprocher ces trois phrases et d’aborder séparément (à des moments de l’année différents) les verbes qui demandent l’auxiliaire être, la forme de phrases passive, et l’emploi du PP comme adjectif, en évitant précisément les phrases ambiguës et l’utilisation d’un même verbe.
L’apprentissage se fait « en spirale » et d’année en année, les notions s’affinent et se complexifient.
Je ne suis pas un spécialiste de la grammaire scolaire et de sa pédagogie, mais il me semble que vous pouvez faire intervenir la notion d’agent pour distinguer un passif (ex. B) d’un simple attribut d’état (ex. C). C’est le même mécanisme que pour différencier les temps de conjugaison. Cela doit être compréhensible par des C.M.2.
Bonjour,
Merci pour vos réponses. Je vous rassure, ce ne sont pas les exemples donnés aux élèves, mais les phrases que j’ai choisi pour illustrer mes propres interrogations.
Effectivement, l’idée n’est pas de les enseigner par comparaison. D’ordinaire, nous les traitons bien séparément. Mais parfois, il y a collision quand nous analysons des phrases.
En dictée par exemple, je prends un temps pour leur faire identifier les verbes conjugués des phrases qu’ils écrivent et les voix passives sont souvent cachées.
Par exemple, dans la phrase suivante : « La cathédrale de Reims est connue pour être le lieu de sacre des rois de France. »
Ou encore sur une dictée sur un château fort : « Ils étaient construits en hauteur. »
Dites-moi si je me trompe mais ici nous sommes sur des voix passives (sous-entendu « connue par le gens »). Mais quand on vient de voir la leçon épithète vs attribut du sujet… je sais que je perds des élèves qui pensaient pourtant avoir compris l’attribut du sujet. Là, ils en ressortent avec le sentiment de n’avoir rien compris parce que je leur dis que ca n’en est pas un alors qu’il semble en avoir tous les codes.
Je cherche donc encore comment leur donner « la bonne astuce ».
Il y a une partie de moi qui dit « bon, ce n’est peut-être pas grave s’ils pensent que c’est un attribut du sujet. Ils sont peut-être trop jeunes encore. » et une autre partie de moi : « C’est peut-être justement là qu’il faut leur donner la bonne clé. »
Reste à trouver cette clé…
Belle journée.
oui, très juste pour les voix passives de vos deux phrases,
je pense qu’il faut insister sur Voix passive / voix active et leur faire chercher l’attribut du sujet uniquement après qu’ils ont trouvé que c’était une voix active.
La souris est mangée par le chat :
1) la souris ne mange pas …. voix active, pas d’attribut
mangée fait corps avec le verbe être
Un Participe Passé est Attribut quand il n’est pas suivi par un Complément d’Agent.
La souris est allongée à côté du chat (allongée est attribut du sujet, il se réfère à la souris).
Je réitère ma notion d’agent explicite qui distingue un participe issu du passif d’un participe qualificatif. Je pense qu’un élève moyen comprend la différence entre :
– le palais est construit par les entreprises de travaux publics (forme réversible : des entreprises construisent le palais) ;
– le palais est construit en hauteur (non réversible).
De plus, on peut dans ce dernier cas souvent remplacer le participe par un adjectif :
– Le Louvre est connu de beaucoup d’étrangers ;
– Le Louvre est connu dans le monde entier (= est célèbre dans le monde entier).
