RE: Avenue (de) Lattre-de-Tassigny ?
Bonjour,
À Brignoles, une voie de circulation est officiellement désignée, selon ce que j’observe, par l’appellation « Avenue de Lattre de Tassigny ». Je ne vois pas vraiment comment corriger ça pour publication dans un document soigné.
Il convient d’écrire le terme générique en minuscule : « avenue… ». Le terme spécifique commence par des majuscules et a besoin de traits d’union, ce qui donne : « avenue de Lattre-de-Tassigny »… Cependant, le premier « de », la particule, n’a pas sa place ici, à mon avis. Formellement, cette avenue devrait être appelée « avenue Lattre-de-Tassigny », ou bien : « avenue Jean-de-Lattre-de-Tassigny », ou encore : « avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny », mais pas « Avenue de Lattre de Tassigny ».
Comment auriez-vous résolu ce cas ?
La préposition « de » introduit souvent un nom apposé, comme dans « la ville de Paris ». Elle ne porte pas de sens. Elle est parfois facultative et on peut par exemple dire au choix « le nom de Moulin lui va bien » ou « le nom Moulin lui va bien ». Pour les lieux, l’usage varie, on a officiellement : le lycée Colonel-Arnaud-Beltrame et la place du Colonel-Fabien. Il n’y aurait pas de faute syntaxique à écrire sans préposition « avenue Maréchal-Juin ». Mais inversement, ce que nous constatons, c’est que quand le nom d’une rue est un nom de personne non accompagné, il n’y a jamais de préposition « de », donc dans votre exemple il s’agit obligatoirement de la particule, particule dont la présence vous étonne.
Vous n’abordez pas la question principale, qui est simplement que la particule est maintenue avec certains noms qu’on perçoit comme un tout, quelle qu’en soit la raison. Puisqu’on dit « j’ai rencontré de Mun », on dit aussi « la rue de Mun ». C’est certainement cette même raison d’un nom monosyllabique qui conduit à conserver la particule à « de Lattre de Tassigny ».
Alors que conserve-t-on en conservant un « de » qui en l’absence de prénom ou de titre antéposé ne peut plus être interprété syntaxiquement comme une préposition ? C’est évidemment un morceau du nom d’une personne en particulier qu’on conserve. Mais faut-il une majuscule ? Répondez à cette question indépendamment de la question des noms de rues : j’ai rencontré de Lattre ou j’ai rencontré De Lattre ?
Si comme la majorité des auteurs vous avez choisi la minuscule malgré l’absence de prénom et de titre, la question se pose à peine, on a juste un nom propre ne commençant pas par une majuscule. Et ce n’est pas de donner ce nom propre à une rue qui devrait en changer l’écriture. Si comme nom propre désignant une personne on n’y met pas de majuscule, comme reprise de ce nom propre pour désigner un lieu, on ne va pas faire apparaître une majuscule arbitrairement. Si on écrit « j’ai lu de Wismes », on écrit de même « j’habite rue de Wismes ». Si on écrit « j’ai rencontré de Lattre », on écrit « l’avenue de Lattre ». Si on choisit d’écrire « l’avenue De Lattre », c’est qu’on aurait également écrit « j’ai rencontré De Lattre », il y a une logique qu’il faut assumer entièrement.
Ensuite se pose la question des traits d’union. Ces traits d’union servent à agglomérer des mots qui sans traits d’union auraient un autre sens. C’est leur seule et unique fonction. Il serait donc logique de faire participer l’article, ou la particule conservée, à l’ensemble, et de l’y solidariser.
Et cependant l’article initial du nom propre, pas davantage que la particule ne sont liés au reste par un trait d’union, et on écrit :
— Voici Yves Le Roux. Voici Le Roux. La rue Yves-Le-Roux. La rue Le Roux.
— Voici Albert de Mun. Voici de Mun. La rue Albert-de-Mun. La rue de Mun.
— Voici Jean de Lattre de Tassigny. Voici de Lattre de Tassigny. La rue Jean-de-Lattre-de-Tassigny. La rue de Lattre-de-Tassigny.
Cette convention illogique existe. Je n’y trouve pour ma part rien de « soigné » comme vous le dites, mais seulement le respect d’un arbitraire illogique.
[j’ai remplacé mon exemple avec « du » par un exemple plus clair avec « de »]
