RE: L’emploi d’une conjugaison au passé est-il en pareils cas approprié ?
Bonjour.
« Le père m’a demandé si j’étais « el gringo con la plata », soit l’acheteur de leur marchandise. »
Il s’agit d’une action qui vient de se dérouler. Disons, il y a une heure. Est-il ici correct d’employer une conjugaison au passé, plutôt qu’au présent ? Car ne m’a pas été demandé si je l’étais, mais si je le suis ! Devrais donc plutôt écrire : « Le père m’a demandé si je suis « el gringo con la plata », soit l’acheteur de leur marchandise » ? C’est un cas récurrent qui me fait systématiquement douter.
Un cas semblable : « Deux jours après son refus, quand je m’étais rendu au port demander aux uns et aux autres un passage vers Trinidad, le capitaine du Santa Maria dépêche un émissaire. »
Je m’étais ou je me suis ?
Merci d’avance pour votre attention.
C’est vrai qu’il y a des cas – le vôtre n’en fait pas partie – où la « déconcordance » des temps est possible, mais même alors, vous serez sûr de ne jamais vous tromper en appliquant la concordance.
Alors dans quels cas peut-on ne pas respecter la concordance ? Je cite ce (long) extrait de la grammaire de Dauzat (pas récent-récent, mais toujours d’actualité et à mon avis très clair) :
« Quand la principale est au passé, la concordance de forme réclamerait le passé en subordonnée, mais la langue a trouvé un procédé particulier pour l’expression du futur et a réagi pour l’expression du présent. […]
Après les verbes exprimant non plus une croyance, une espérance, mais une affirmation, un énoncé, on peut employer le présent (proscrit à tort par la Grammaire de l’Académie) et le futur. On dispose donc de quatre tours, exprimant les nuances entre le dubitatif « il m’a écrit qu’il viendrait demain », la probabilité « … qu’il venait demain » et la certitude « …qu’il vient [qu’il viendra] demain » (1). L’emploi du présent en subordonnée permet en outre de préciser les faits présents par rapport à celui qui parle : « il m’a écrit qu’il était capitaine » ne précise pas si le correspondant est toujours capitaine à l’heure présente, tandis que « il m’a écrit qu’il est capitaine » l’affirme sans doute possible. Le futur est encore plus nécessaire pour situer dans l’avenir, par rapport à celui qui parle. « J’ai appris qu’il va venir à Paris et qu’il y séjournera quelque temps » (affirmation opposée à la double formule dubitative : « qu’il allait venir et qu’il y séjournerait ».) Enfin pour exprimer une idée générale, située hors temps, le présent est plus indiqué, plus net que l’imparfait : « On a toujours pensé que la colère est [était] mauvaise conseillère ». Réaction de la logique contre les servitudes grammaticales. — Psychologiquement, l’imparfait et le conditionnel, comme dans le style indirect, relatent la pensée d’autrui, tandis qu’avec le présent et le futur de l’indicatif apparaît l’opinion de celui qui parle ou écrit.
(1) Le présent est encore plus affirmatif que le futur ; celui-ci est employé pour insister sur l’élément temporel. »
(Souligné graissé par bibi.)
Votre phrase rapportée étant une question, cette exception à la concordance n’est pas possible.
Merci, Marcel1. Combien de subtilité dans la langue française ! « Logique contre les servitudes grammaticales »… « proscrit à tort par la Grammaire de l’Académie »… Je suis encore loin du niveau où je pourrai(s) me permettre à raison de faire un pied de nez à la grammaire et à l’Académie… !
De rien Pompadour. 🙂

Cathy Lévy
en pareil cas
Car il ne m’a pas été demandé si j’étais cet homme, mais je l’étais bel et bien !
Devrais-je donc
Pompadour
« En pareils« , avec un « s », non ? Vu que je souhaite savoir si dans tous les cas semblables cet emploi est approprié…
(« Devrais-je donc » est une faute d’inattention.)