Accord du participe passé d’un verbe pronominal

Bonjour à tous,

Je n’arrive pas à interpréter l’invariabilité du participe passé volé dans l’expression se voler dans les plumes.

Exemple :

Les deux harpies se sont volé dans les plumes.

Mon interprétation étant la suivante :

la locution verbale se voler dans les plumes est figée et le pronom se n’est donc pas analysable. Littéralement, la phrase ne signifie pas que les deux harpies ont volé elles-mêmes dans les plumes, mais plutôt qu’elles se sont bagarrées.

Dans un tel cas de figure et sauf erreur de ma part, le pronom se fait corps avec le verbe et le participe passé s’accorde en genre et en nombre avec le sujet.

J’aurais donc plutôt écrit : « Les deux harpies se sont volées dans les plumes. »

Mais a priori, le participe passé est invariable, d’où mon scepticisme.

Avez-vous une idée ?

M.

Maximus Amateur éclairé Demandé le 9 juin 2022 dans Accords

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4 réponse(s)
 

Oui j’ai une idée :
Les deux harpies se sont volées dans les plumes signifie : les deux harpies ont volé dans les plumes l’une de l’autre.
ou encore, pour être plus claire : une des harpie a volé dans les plumes de l’autre et l’autre a fait pareil.
Se = l’une de l’autre il indique la réciprocité. Il n’est pas COD de « voler » mais complément d’attribution de la locution verbale  » voler dans les plumes de quelqu’un » qui a le sens de « se jeter sur quelqu’un ».
La locution n’a jamais de COD d’où son invariabilité.

Tara Grand maître Répondu le 9 juin 2022

Elle s’est envolée n’a jamais de C.O.D. mais s’accorde toujours…

le 9 juin 2022.

Oui. J’ai eu tort de généraliser.

le 10 juin 2022.

Cette expression est récente (je ne trouve rien avant 1929) et semble venir de l’argot (les premières mentions régulières  apparaissent vers 1950 dans des romans policiers).
Il y a donc peu d’analyses sur l’accord. Cela étant, vous décrivez dans votre question ce qu’on appelle un verbe « essentiellement pronominal » (le pronom ne s’analyse pas et fait partie intégrante du verbe). La règle est que le participe de ce type de verbe s’accorde par principe. Ici, ‘voler’ semble une déformation de ‘s’envoler’ : elles se sont envolées dans les plumes (chacune dans celles de l’autre). Il est à noter qu’au singulier (en forme non réciproque donc), la structure est différente : elle lui a volé dans les plumes. Le passage du singulier au pluriel a modifié la morphologie du verbe, ce qui est rare.
En conclusion, sauf analyse pertinente montrant le contraire, j’accorderais le participe avec le sujet.

Chambaron Grand maître Répondu le 9 juin 2022

Salut Chamb’ !

J’ai répondu quelques minutes après vous, mais j’étais en train de travailler le sujet depuis une heure. Tout d’abord, merci de commencer, comme je l’ai fait, par mettre à plat les arguments de Tara. Des arguments qui tiennent comme souvent en quelques mots, comme une forme d’évidence lâchée avec désinvolture, qui ne sont jamais formulés de façon logique, mais sont généralement des tentatives de justification après coup. C’est tout le contraire d’un raisonnement.

Votre approche, très orientée sur le sens et l’origine de l’expression, rejoint celle de Maximus : puisque au fond tout ça ne veut pas dire grand chose, autant en faire une expression pronominale sans chercher dans ses éléments des COD ou autres COI qui seraient probablement très décevants quant au sens ;  et donc accorder.

De mon côté j’ai pris le problème par un autre bout, celui de l’analyse syntaxique (peut-on réintroduire l’auxiliaire avoir en modifiant les personnes ? et si oui avec quel pronom ? et ce pronom est-il plutôt de la forme COD ou de la forme COI ?), et j’ai tiré la conclusion qu’il ne fallait pas accorder.

Vous terminez ainsi : « sauf analyse pertinente montrant le contraire, j’accorderais le participe avec le sujet ». Vous ai-je convaincu ?

le 9 juin 2022.

J’ai fait un commentaire entretemps sur votre première réponse. Je vous reconnais la cohérence mais voyez mes raisons liées à ce cas spécifique.
Le système d’accord du participe passé en français est baroque et inutilement complexe. Je suis (avec de nombreux grammairiens et linguistes) un fervent partisan de sa réforme. En attendant, il faut gérer l’ingérable…

le 9 juin 2022.

Pie : votre analyse est fort intéressante. La mienne était en effet superficielle et illogique. Mais pourquoi avez-vous éprouvé le besoin de m’égratigner (oh un tout petit peu et je vous remercie de ne pas en avoir fait plus). Voyez-vous, à tort ou à raison, je réponds à un certain nombre de questions et il m’arrive de déraper c’est vrai, ce qui sans doute est impardonnable. Ceci dit, sans rancune aucune mais je préfère les échanges bienveillants.
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le 10 juin 2022.

[La réponse de Tara est incohérente, commençant par réclamer l’accord, puis finalement le refusant au prétexte d’un argument totalement faux (« La locution n’a jamais de COD d’où son invariabilité »). Une locution qui n’a jamais de COD n’est pas pour autant forcément invariable : elles se sont volé dans les plumes ; elles se sont envolées dans les airs. Maximus demande simplement si on ne serait pas ici dans le cas d’une expression où le pronom « se » serait inanalysable.]

Quand le pronom « se » n’est pas analysable, vous avez raison, on accorde.
— Elles se sont envolées, elles se sont méfiées…

Mais il ne faut pas conclure trop vite qu’un pronom personnel est inanalysable.

Pour savoir si le « se » est analysable ou non dans une construction pronominale, on peut commencer par voir si on peut le remplacer par un autre pronom en changeant de personne, avec l’auxiliaire « avoir ».
— Je lui ai volé dans les plumes. Elle m’a volé dans les plumes Elles nous ont volé dans les plumes…
Donc oui, le pronom, puisqu’il change, est analysable, et vous n’êtes pas devant un verbe pronominal par nature. C’est simplement la construction pronominale d’un verbe transitif. Pour faire ce test, il faut connaître l’expression, mais c’est manifestement votre cas.

Ensuite, il voir si ce pronom joue un rôle syntaxique de COD ou d’autre chose (souvent nommé COI).
Si on ne devine pas d’instinct (car souvent le sens suffit) si le pronom a une valeur de COI ou de COD, il faut le mettre par exemple à la troisième personne du pluriel (le pronom COD est « les« , le pronom COI (ou autre fonction) est « leur« .
a) — Je leur ai tiré les cheveux, je leur ai tapé dessus, je leur ai tiré dans les pattes, je leur ai frappé la tête, je leur ai volé dans les plumes…
b) — Je les ai tirés par les cheveux, je les ai pris à la gorge, je les ai frappés à la tête

Dans une bagarre, la construction pronominale est réciproque, mais même dans une construction réciproque, les deux sens (COD et COI) sont possibles. L’accord se fait comme ci-dessus, seuls les pronoms et l’auxiliaire changeant :
a) — Elles se sont tiré les cheveux, elles se sont tapé dessus, elles se sont tiré dans les pattes, elles se sont frappé la tête, elles se sont volé dans les plumes…
b) — Elles se sont tirées par les cheveux, elles se sont prises à la gorge, elles se sont frappées à la tête

« Voler dans les plumes » entre dans la catégorie (a) : je leur ai volé dans les plumes, elle se sont volé dans les plumes.

Pie Débutant Répondu le 9 juin 2022

Votre cas a) (qui débouche  sur la préconisation d’invariabilité) ne tient pas compte du fait que dans cette expression spécifique le pronom se  n’est pas un C.O.I.  Idem pour elles se sont tapées dessus . On tire bien les cheveux à quelqu’un, mais on ne lui (C.O.I.)  vole rien et on ne lui (C.O.I.) tape pas quoi que ce soit.
C’est un cas particulier dû à l’origine non conventionnelle de la tournure. La règle d’accord avec les verbes essentiellement pronominaux est justement là pour ces bizarreries (archaïsmes et autres).

le 9 juin 2022.

Bonjour,

Comme l’a indiqué Pie, ce pronom (dit « datif de la possession inaliénable » ou « datif possessif » ou encore « datif de la totalité impliquée » – je crois avoir fait le tour des différentes dénominations – la littérature sur cette notion est relativement abondante et facilement accessible sur le Net) est analysable : sémantiquement il renvoie au possesseur (ici des plumes) ; syntaxiquement, les auteurs ne sont pas d’accord, certains y voient un complément du verbe (bien qu’il ne fasse pas partie de sa valence), d’autres y voient un complément du nom (ici les plumes). Cette absence de consensus quant à la fonction de ce syntagme ne me parait pas influer sur l’accord du participe passé, quelle que soit la fonction retenue, on ne peut que conclure à l’absence d’accord, puisque le pronom est analysable et est introduit par une préposition. D’ailleurs, toujours comme l’a mentionné Pie, on voit bien qu’à la forme non pronominale et à la troisième personne, on a le pronom datif lui (leur) et non le pronom accusatif le (la, les), et le non accord du participe :

Il a volé dans les plumes de sa voisine > Il lui a volé dans les plumes.

Et donc : Les deux harpies se sont volé dans les plumes.

phil-en-trope Grand maître Répondu le 11 juin 2022

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