RE: Est-ce que le verbe « se réinventer » existe?

Bonjour,

Je me questionnais concernant la forme pronominale du verbe « réinventer », que je ne trouve nulle part dans les dictionnaires en ligne. Cette forme est-elle donc correcte?

Octobre2017 Membre actif Demandé le 27 décembre 2021 dans Général

Bonjour,

Cette forme est clairement usitée, sa correction s’évalue selon le degré de purisme de chacun.

L’employer ou pas dépend donc 1) de votre de degré de purisme, 2) du degré de purisme supposé ou avéré de vos lecteurs / évaluateurs.

(Et ainsi que je l’ai indiqué dans ma réponse infra, cette forme pronominale est indirectement donnée par le Robert en ligne.)

le 28 décembre 2021.

Octobre2017, ne tenez pas compte du commentaire ci-dessus, qui s’accorde un statut particulier et prétend faire  l’arbitre entre les quinze réponses que vous avez reçues à l’heure où j’écris. Si vous voulez connaître la réponse de phil-en-trope, allez lire la quatorzième réponse, il y développe son approche de votre question.

le 28 décembre 2021.
18 Réponses

Seuls les verbes qui n’existent qu’à la forme pronominale, ou ayant un sens différent à la forme pronominale, ont une entrée spécifique dans le dictionnaire.
Mais les verbes transitifs peuvent se construire pronominalement, sans autorisation explicite du dictionnaire.
a) « se regarder » n’est pas dans le dictionnaire, mais on dit « il se regarde dans le miroir ».
b) « se boire » n’est pas dans le dictionnaire, mais on dit : « le thé se boit chaud ».
c) « se casser » n’est pas dans le dictionnaire, mais on dit : « la branche se casse ».
Ce sont trois utilisations différentes de la forme pronominale.

a) La construction pronominale de sens réfléchi est difficile à concevoir ici, parce qu’il faudrait une démarche de la part de la langue, presque une intention, mais une langue est-elle capable d’une telle démarche ?
Le peuple réinvente sa langue à chaque génération, correct
La langue réinvente elle-même à chaque génération, la langue se réinvente à chaque génération, plutôt non
C’est simplement un problème de sens qui empêche ici la construction pronominale « se réinventer » dans un sens réfléchi (mais ce serait parfaitement possible, dans la limite du sens, si le sujet était une personne ou un organisme).

b) La construction pronominale de sens passif est correcte :
On boit le thé chaud / le thé se boit chaud / le thé est bu chaud (par les amateurs)
On réinvente la langue en permanence / la langue se réinvente en permanence / la langue est en permanence réinventée (par le peuple)
Mais votre phrase complète (« … si on lui laisse de le temps de le faire ») suggère qu’on souhaite que le sujet soit l’agent du verbe, ce qui n’est pas le cas ici car l’agent, exprimé ou non, est extérieur. Donc on ne peut pas ici utiliser la construction pronominale « se réinventer » dans un sens passif.

Arrivé ici, on peut penser que la seule solution pour utiliser « se réinventer » serait qu’il existe un sens spécifique, qui rendrait le verbe obligatoirement pronominal dans ce sens (pronominal autonome, pronominal subjectif), et alors pour le confirmer on souhaiterait que ce soit précisé dans un dictionnaire, et ce n’est pas le cas.
Mais il existe une forme pronominale qui, bien que d’apparence passive, n’a pas d’agent extérieur, même pas sous-entendu, même pas un « on ». Reprenons les trois constructions :
a) la vitre se casse = la vitre casse elle-même ? non
b) la vitre se casse avec un marteau = on casse la vitre avec un marteau ? oui
c) la vitre se casse sous l’effet du vent = on casse la vitre sous l’effet du vent ? non
C’est cette dernière construction (c) qui est utilisée dans « la langue se réinvente », une construction ni réflexive (a) ni passive (b), pas forcément évidente à analyser, mais en fait très fréquente. Certains grammairiens appellent cela une construction anticausative, mais on peut aussi en faire un sous-groupe des constructions pronominales subjectives.

c) Vous avez donc affaire dans votre phrase à une construction pronominale anticausative.
C’est une construction fréquente pour exprimer un changement d’état, sans que ce soit le sujet qui agisse, et sans non plus qu’il y ait un agent extérieur. Il n’est nul besoin qu’un sens spécifique soit recensé pour qu’un verbe de transformation puisse se construire pronominalement. On peut mettre la chose transformée en sujet de la phrase, comme si elle était le sujet du verbe d’état « devenir » :
La ville s’embourgeoise, la ville se transforme toute seule, la ville se reconstruit sur elle-même, la branche se casse sans raison, la salle se remplit doucement, la langue se réinvente en permanence.
Peut-être êtes-vous tenté d’accorder un statut spécifique à « s’embourgeoiser » ou « se reconstruire », que vous n’accordez pas à « se prolétariser » ou « se réinventer », selon qu’ils sont ou non dans le dictionnaire ? Quand bien même ! La construction est la même (la ville s’est prolétarisée au début du siècle, la ville s’est reconstruite sur elle-même au début du siècle, cette langue s’est réinventée au début du siècle), et elle est grammaticalement valide. Il n’est nul besoin d’un sens spécifique lexicalisé pour utiliser cette construction pronominale anticausative.

Anonyme Érudit Répondu le 28 décembre 2021

Les formes pronominales se trouvent bien sûr dans les dictionnaires, la valeur sémantique y est même éventuellement indiquée. Je ne prends qu’un seul des trois cas cités – (se) boire – et un seul dictionnaire – Le Tlfi (mais on pourra facilement vérifier que ce traitement n’est pas réservé à ce seul verbe par ce seul dictionnaire) :

− [Avec un suj. désignant une boisson] Emploi pronom. à valeur passive. Se boire.

a) Être bu (habituellement). Tisane qui se boit chaude, qui se boit froide; vin qui se boit au dessert (Besch. 1845).
b) Pouvoir être bu. … cela ne valait pas le vin du Rhin, mais cela se buvait et tout le monde avait soif (P. Féval dansGuérin1892).
 

Ce n’est pas le cas pour réinventer dont la forme pronominale ne se trouve pas dans les dictionnaires « de référence » facilement accessibles en ligne (Tlif, Académie, Larousse, Robert, Usito).

 

le 28 décembre 2021.

Dans le TLFi, même à l’entrée « déguster », il n’y a pas « se déguster », donc le bourgogne ne se déguste pas avec du caviar… c’est absurde. Vous appliquez la méthode Prince, aller chercher dans les dictionnaires et sur Google pour savoir si tel verbe peut s’utiliser de telle ou telle manière. Il faut (surtout lui mais un peu vous aussi) apprendre à faire la différence entre un dictionnaire et une grammaire. Vous devez bien comprendre que les verbes transitifs peuvent avoir une construction pronominale passive. Pourquoi tant qu’à faire ne pas chercher dans le dictionnaire si tel ou tel verbe peut s’utiliser au futur ? ou au féminin ? Comprenez qu’il ne faut pas chercher sur internet ou dans les dictionnaires si quelqu’un a pris la peine de faire un exemple explicite de chaque utilisation possible d’un mot.

le 30 décembre 2021.

Vous dites «  Vous devez bien comprendre que les verbes transitifs peuvent avoir une construction pronominale passive. »

Tous les verbes transitifs, vraiment ?

Concerner est transitif, peut-il pour autant accepter une construction pronominale passive ?, j’en doute. Même remarque pour comporter, avoir, etc.

le 31 décembre 2021.
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