Concordance des temps, la discorde

Bonjour, je viens demander un peu de l’aide, je viens d’avoir une discussion assez houleuse avec une personne pointilleuse en orthographe, concernant la concordance des temps.

Selon cette personne la concordance des temps est « figée », régie par une règle bien définie, claire et définitive : « présent = passé composé », « passé simple = passé antérieur », etc.

Moi, selon mes recherches, je pense que la concordance des temps est plus une affaire de sens qu’autre chose.

Dans une édition du Bescherelle, il est écrit que la conjugaison de la subordonnée est soumise au sens souhaité plutôt qu’à une règle stricte.

Dans le Grevisse, il est écrit : « Ce n’est pas le temps principal qui amène le temps de la subordonnée, c’est le sens. Le chapitre de la concordance des temps se résume à une ligne : Il n’y en a pas. (Pensée, p. 782 – Brunot) »

Donc, si vous avez un avis sur la question. Merci.

Bonne soirée.

LeDonk

LeDonk Maître Demandé le 2 août 2017 dans Accords

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5 réponse(s)
 

Bonjour,

Je vais avoir beaucoup de mal à exprimer une opinion tranchée et abstraite sur le sujet. Les règles de la concordance des temps sont fort utiles pour permettre à l’auditeur ou au lecteur de se repérer, notamment, dans le temps d’un discours ou d’un récit. Qu’elles soient rigoureuses et intangibles, je ne le crois pas à priori, puisque la langue dépend avant tout de ce que l’on veut dire. Mais il me faudrait quelques exemples pour réfléchir au sujet sérieusement et vous donner un avis utile.

Evinrude Grand maître Répondu le 2 août 2017

Bonjour Evinrude.

Voici un exemple donné par le Grevisse :

« Je regardais avec inquiétude la lumière des lampes presque consumées qui menaçaient de s’éteindre. Tout à coup une harmonie semblable au chœur lointain des esprits célestes sort du fond de ces demeures sépulcrales : ces divins accents expiraient et renaissaient tout à tour; ils semblaient s’adoucir encore en s’égarant dans les routes tortueuses du souterrain. Je me lève et je m’avance…(Chateaubriand, Les Martyrs, V. Cité par Grevisse). »

Il semble donc tout à fait possible d’écrire un texte de la sorte =>

« La nuit était rapidement tombée. Paul s’empara de l’arme. Il n’a jamais tiré de sa vie, il a peur. Il pressa la détente. Le canon cracha son métal. Létal. Possessif. Un cri, puis un corps qui tombe dans l’obscurité. Puis, le silence. Paul s’avança timidement, l’arme le long de sa jambe. L’air sentait la poudre, la mort. Au sol, la mort. Il vient de tuer son frère. »

Je me trompe ?

Merci.
LeDonk

LeDonk Maître Répondu le 3 août 2017

Bonjour LeDonk,

Ah oui, pour cet exemple précis, je peux vous donner mon opinion. Dans le texte de Chateaubriand, il s’agit d’une valeur, disons, « répertoriée » du présent : le présent de narration. Le « décor » est à l’imparfait et l’action elle-même est au présent au lieu du passé simple attendu. C’est un effet de style, certes, mais le présent renforce l’effet de surprise, rapproche l’action du lecteur, le met subitement au cœur du récit. Il le fait mieux encore que le passé simple qu’il remplace.

Dans votre texte, l’alternance de présent et de passé simple atténue un peu cet effet. Je ne peux pas dire que les temps soient « faux », car le jeu imparfait, passé simple, présent, peut jouer comme un effet de zoom. C’est ce que l’on voit dans la deuxième moitié du paragraphe : « Paul s’avança timidement, l’arme le long de sa jambe. L’air sentait la poudre, la mort. Au sol, la mort. Il vient de tuer son frère. » Une seule phrase me gêne un peu : « Il n’a jamais tiré de sa vie, il a peur. » Ce passé composé/présent est difficile à comprendre, il marque une rupture supplémentaire. Comme ce passage fait partie de l’environnement de l’action, j’essaierais de le garder à l’imparfait : « N’ayant jamais tiré de sa vie, il avait peur. »

Ce n’est qu’une opinion mais j’espère qu’elle vous est utile.

Evinrude Grand maître Répondu le 3 août 2017

Merci, Evinrude, pour votre opinion.

Hormis cette phrase utilisant le « passé composé / présent », mon texte semble donc juste. Et encore même cette phrase n’est pas catégoriquement fausse, si j’ai bien compris. En littérature, la notion de style semble s’affranchir de certaines barrières, le tout étant d’avoir une construction logique.

La concordance des temps semble bien complexe, on pourrait résumer peut-être ainsi : il y a la concordance des temps dite « scolaire », et une libre appréciation en ce qui concerne son utilisation dans la littérature.

Je me rends compte qu’un texte pourra être juste pour l’un et faux pour l’autre même s’il est finalement juste…

Merci.

LeDonk Maître Répondu le 3 août 2017

Dans la notion de style, je ne sais si l’on peut parler de « juste » et de « faux ». Mais pour s’affranchir de certaines règles et maîtriser certaines figures de style, il faut cependant un peu de talent  et on le fait parfois au risque d’être mal compris ou de bâtir des constructions peu harmonieuses.

le 3 août 2017.

Oui, Evinrude, je suis d’accord avec vous, c’est souvent au risque d’être mal compris par le lecteur…

Merci.
LeDonk

LeDonk Maître Répondu le 3 août 2017

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